Sources : Décisions-Achats.fr (Interview vidéo de Guy Isimat-Mirin, premier vice-président de l'Obsar et associé du cabinet Mazars, responsable du secteur public disponible dans le document source)
La majorité des acteurs privés et publics s'engagent désormais dans une démarche d'achats responsables. Tel est l'enseignement principal d'une étude réalisée par l'Obsar et délivrée lors d'un colloque. Une bonne nouvelle même si des progrès restent encore à faire.
« En matière d’achats responsables, il faut passer à la vitesse supérieure. Car on ne sortira pas de la crise actuelle sans un véritable changement de nos habitudes de consommation ». L’ancien ministre Michel Barnier, aujourd’hui commissaire européen au marché intérieur, n’y est pas allé par quatre chemins pour qualifier l’enjeu que représente désormais l’achat professionnel responsable lors du troisième colloque de l’Obsar (Observatoire des achats responsables), organisé le 23 janvier dernier.
Des progrès à confirmer
Un rendez-vous fédérateur qui a permis de faire le point sur l’évolution de telles pratiques aussi bien dans le secteur public que privé. « Et les progrès en la matière sont notables, même s’ils doivent encore être confirmés » a rappelé Pierre Pelouzet, président de la Cdaf (Compagnie des acheteurs de France) et directeur achats de la SNCF, en se référant aux résultats du baromètre 2011 de l’Obsar délivrés à l’occasion de ce colloque.
Premier enseignement tiré par ce baromètre : la quasi-totalité des structures publiques (91 %) et pas moins de 82 % des entreprises privées ont désormais mis en place une politique d’achats responsables, des résultats largement en hausse par rapport à l’an dernier. « Si les grandes entreprises privées sont désormais aussi performantes en la matière que les acteurs publics, des marges de progrès non négligeables s’imposent toutefois encore parmi les PME et au sein du secteur industriel », note Jacques Schramm, président de l’Obsar.
Plus grande maturité dans le public
Signe que les achats responsables restent plus matures dans le public que dans le privé, ils constituent une priorité pour 77 % des organisations publiques contre seulement 45 % des entreprises privées. Les motifs de mise en place d’une telle politique se conjuguent au pluriel : respecter la réglementation et des normes (76 % pour le public contre 48 % pour le privé), valoriser l’image de l’entreprise, privilégier une démarche de qualité globale, etc.
Preuve que les acheteurs bénéficient régulièrement de formation en matière d’achats responsables, 81 % des répondants estiment être dotés d’un niveau de connaissance suffisant en la matière.
Priorité à l’approche TCO
Autre résultat de l’enquête : 74 % des répondants déclarent miser sur une approche TCO (Total cost of ownership) des produits (coûts d’acquisition + logistique + non-qualité + risques RSE …), « une approche qui constitue le véritable point de départ d’une démarche d’achats responsables puisqu'elle contribue à son acceptation économique en interne », selon Jacques Schramm.
Une approche adoptée notamment par Lucie Seynave, chef de projet achats durables chez Veolia Environnement, alors intervenante au colloque : « Nous avons réussi à privilégier en interne l’achat de pompes durables au coût facial pourtant plus élevé que des modèles low cost. » Comment ? « En démontrant que le coût d’acquisition d’un tel modèle de produit ne représentait de toute façon que 5 % de son coût total réel, incluant la maintenance, la consommation d’énergie, etc. D’où le choix, in fine, d’une pompe, certes, haut de gamme, mais moins énergivore et à la durée de vie bien plus longue. »
Quels objectifs visés ?
Notons qu’en matière d’achats verts, l’objectif principal recherché par les répondants est la réduction des consommations (51 % dans le public contre 45 % dans le privé), la refonte globale des process (28 %, 33 %) et le recyclage (18 %, 17 %). Tandis qu’en matière d’enjeux sociétaux, s’imposent le respect des droits de l’homme suivi de la lutte contre le travail dissimulé, les conditions de travail décentes, le recours en priorité au bassin d’emploi local et l'insertion des personnes éloignées de l'emploi.
Côté sourcing, l’étude révèle que les critères économiques (dont le prix) restent encore prédominants dans le choix des fournisseurs (ralliant 47 % des répondants), derrière les critères environnementaux (26 %) et sociaux (14 %). Toutefois, 75 % des répondants jugent important la facilité d’accès des PME aux marchés. 70 % disent miser d'ailleurs sur l’allotissement des marchés pour confier certains lots aux petites entreprises tandis que 42 % instaurent des seuils de dépendance client adaptés pour les PME innovantes ou en création. « L’innovation, c’est la force des PME », a souligné Thierry Perrin, chef de mission PME au ministère de la Défense, entité mise en place depuis près d'une quinzaine d'années déjà pour booster la collaboration avec les petites structures. En 2010, celle-ci aurait déjà traité 15 000 demandes émanant de ces fournisseurs.
Quelles perspectives pour les achats responsables ?
Si 56 % des répondants estiment qu’ils ont atteint en 2011 leurs objectifs en matière d’achats responsables, nombre d’entre eux déclarent toutefois composer avec des difficultés susceptibles d'impacter la performance d’une telle politique : contraintes budgétaires (55 %), manque d’indicateurs de mesures clairs (47 %), manque d’expertise interne (41 %), etc. Et c’est pour pallier de telles difficultés, que l’Obsar planche, en partenariat avec l'Afnor, sur un projet de norme sur les achats responsables (baptisée FDX 50-135), déclinaison de la norme ISO 26000 (sortie prévue fin 2012). « Premier document de référence en la matière, cette norme va nous permettre de mieux remplir concrètement nos engagements en termes de développement durable », a conclu Thierry Le Corre, chargé de mission achats responsables chez EDF.
Article rédigé par Charles COHEN