Source : Actualité environnement
Mardi 22 Mai dernier, la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire a autorisé la publication du rapport d’information « Rio+20 : l’émergence d’un nouveau monde », présenté par Laurence Rossignol au nom du groupe de travail « Négociations internationales – Climat Environnement ».
Ce rapport évoque les enjeux de Rio, il propose des préconisations pour une renaissance du développement durable et souligne le rôle des différentes acteurs en titrant sa dernière partie “les acteurs du développement durable : de l’enceinte onusienne aux territoires”. En gros, il formule 16 recommandations, pour une nouvelle gouvernance et une nouvelle régulation.
Voici les 16 recommandations en question :
- La Conférence «Rio+20» devra mettre en œuvre la réforme de la gouvernance mondiale du développement durable. Il est impératif aujourd’hui de mettre fin à une fragmentation, facteur d’inefficacité et de faiblesse, des principes du développement durable au sein de l’ordre des régulations mondiales. Cette réforme doit reposer sur la promotion d’un renforcement du PNUE via sa transformation en une agence spécialisée des Nations unies, unique et centrale, profondément réformée dans son fonctionnement. Le mandat de cette nouvelle organisation devra être précisé. Il pourrait revêtir celui d’un organe coercitif, à la manière de l’organe de règlement des différends spécifique à l’OMC, ou d’un organe d’inspectorat. Parallèlement, le rôle des experts scientifiques spécialisés et du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat devra être renforcé, sous l’égide de ce PNUE nouvelle version, afin que les experts puissent mener des évaluations transversales et diffuser des informations essentielles pour mieux comprendre et donc mieux préserver la biodiversité.
- La Conférence « Rio+20 » devra promouvoir un renforcement du Conseil économique et social (ECOSOC) des Nations unies par l’adjonction d’un pilier environnemental au champ de ses missions.
- La Conférence « Rio+20 » devra définir l’économie verte comme un modèle de développement moins consumériste, plus sobre, économe des ressources naturelles et ouvert aux sauts technologiques lorsqu’ils sont respectueux de l’environnement. Il est le corollaire du droit au même niveau de développement pour tous.
- La Conférence « Rio+20 » devra préconiser des investissements agricoles qui ne mettent pas en péril la sécurité alimentaire locale et qui respectent un cadre juridique protégeant les droits individuels des populations locales. A cet égard, le document final de Rio devra insister sur la nécessaire mise en œuvre des Directives volontaires sur la gouvernance responsable de la tenure des terres, pêches et forêts. Elle devra insister sur la promotion d’une agroforesterie innovante alliant cultures et arbres équitablement répartis sur les territoires.
- La Conférence « Rio+20 » devra donner lieu à l’adoption d’une feuille de route ambitieuse et précise pour la préservation et la gestion durables des océans. Une gouvernance internationale consolidée devra être préconisée en matière de protection de la biodiversité en haute mer et de l’utilisation des ressources marines. L’accent devra être mis également sur un renforcement du contrôle des prélèvements sur les ressources halieutiques, dans un contexte de forte dégradation de l’environnement marin. Enfin, la Conférence « Rio+20 » devra souligner la nécessité de la définition d’un statut juridique de la haute mer, en ajoutant un chapitre à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer.
- La sécurité de l’approvisionnement alimentaire et la sécurité sanitaire devront être mentionnées dans le document final de la Conférence « Rio+20 » et reconnues comme un droit inaliénable de chaque être humain.
- La Conférence « Rio+20 » devra s’engager dans la reconnaissance d’un droit à l’eau universel et à l’accès à l’assainissement et maintenir dans son document final l’actuel chapitre 67 du texte préparatoire à la déclaration finale, « draft zero ». La déclaration finale devra également prévoir la création d’une Agence mondiale de l’eau.
- La Conférence « Rio+20 » devra étendre au niveau mondial l’engagement européen : promouvoir le droit pour tous d’avoir accès à l’électricité et à l’énergie durable et s’engager pour la mise en œuvre d’une feuille de route pour une transition mondiale vers l’énergie durable.
- La Conférence «Rio+20» devra fixer un certain nombre d’indicateurs permettant une évaluation des progrès du développement durable au niveau international. Ces indicateurs concerneront les quatre piliers du développement durable - économique, environnemental, social et culturel. Ils mesureront également les changements dans les modes de production et de consommation ainsi que les déterminants « écologiques » comme le changement climatique, l’utilisation rationnelle des ressources naturelles ou encore la biodiversité. Ils tiendront compte, en outre, de la durabilité et du développement humain afin de rompre avec une vision exclusivement consumériste de la croissance.
- Le document final adopté à la Conférence « Rio+20 » devra reconnaître et consacrer le principe de non régression du droit de l’environnement dans les législations nationales afin d’empêcher tout recul dans la protection de l’environnement.
- La Conférence « Rio+20 » devra promouvoir le développement de l’accès à l’éducation pour tous et l’accès à la contraception.
- La Conférence « Rio+20 » devra intégrer dans son document final un chapitre spécifique consacré à la question des déplacés environnementaux, comprenant notamment la création d’un statut, comme le préconise la résolution du Parlement européen du 29 septembre 2011. La création d’un tel statut permettrait d’avoir une définition harmonisée au plan mondial des déplacés environnementaux et une protection de leurs droits fondamentaux.
- La Conférence « Rio+20 » devra rappeler le rôle essentiel des Parlements nationaux et des organisations interparlementaires dans la déclinaison nationale des programmes et des principes adoptés au niveau global. Elle devra également leur permettre de participer pleinement au processus de négociations et d’être associés aux décisions politiques finales.
- La Conférence « Rio+20 » devra s’attacher à améliorer la participation des acteurs de la société civile à la gouvernance environnementale au niveau mondial afin de garantir l’effectivité du principe 10 de la Déclaration de Rio de 1992. La Convention d’Aarhus gagnerait à être étendue le plus largement possible. Un processus transparent de négociation pour l’adoption d’une convention globale sur le principe 10 de la Déclaration de Rio pourrait être lancé et une aide financière spécifique devra être prévue afin d’encourager les États à le mettre en œuvre.
- La Conférence « Rio+20 » devra reconnaître que la contribution des femmes est un aspect essentiel du développement durable. Elles sont en effet un maillon important du processus de préservation des moyens de subsistance et de la transition vers un nouveau modèle de développement. Le troisième pilier, le pilier social, lie développement durable et éradication de la pauvreté. Le développement durable ne peut composer avec la pauvreté spécifique des femmes et leur mise à l’écart des décisions publiques et de l’éducation. Le document final devra promouvoir l’égalité hommes-femmes.
- La Conférence « Rio+20 » devra reconnaître le rôle clé des collectivités territoriales en matière de développement durable et leur permettre d’obtenir un statut spécifique à côté de la société civile et des Parlements dans les processus de négociation internationaux. La nouvelle gouvernance environnementale qui sera mise en oeuvre au niveau mondial devra intégrer les territoires comme des acteurs à part entière et les associer aux prises de décisions internationales. Elle devra également promouvoir une meilleure coordination entre les différentes conventions relatives à l’environnement et les accords multilatéraux ainsi qu’entre les différents échelons d’action pour permettre une déclinaison du global au local.
La réussite des sommets internationaux dépend de l'implication des Etats. La présence et la solidité de l'Union européenne à la Conférence de Rio sera déterminante. En effet, alors qu'elle n'avait pas réussi à imposer son leadership lors de la conférence de Copenhague de 2009, la Conférence de Durban sur le climat de décembre 2011 a marqué le retour sur la scène des négociations internationales environnementales d'une Union européenne solide, cohérente et jouant un rôle moteur. C'est pourquoi la France, de son côté, doit aborder le sommet de juin avec une position ambitieuse et forte mais également se montrer active dans et pour l'Union européenne.